L'Inflammation de Bas Grade, de quoi s'agit-il ?
- Barbara
- 21 janv. 2022
- 9 min de lecture

Elle est insidieuse, silencieuse, indolore et invisible. Sa capacité à passer sous les radars la rend difficile à détecter et ses effets délétères sont souvent pris en charge trop tard, lorsque de véritables symptômes apparaissent. Pourtant, la prévention de l'inflammation de bas grade pourrait éviter la survenue de nombreuses pathologies ou tout du moins la retarder.
Mais qu'est-ce que c'est exactement ce "mal" dont beaucoup d'entre nous souffrons mais dont nous n'avons pas conscience ?
Tout d'abord, une définition de l'inflammation en elle même s'impose.
C'est une réaction de défense de l'organisme contre une agression : une bactérie, un virus, une entorse, une coupure ... Tous les organes peuvent être touchés et leurs fonctions peuvent en être altérée.
Elle est caractérisée par quatre facteurs : rougeur, chaleur, douleur et tuméfaction.
Elle peut être aiguë, c'est à dire d'une intensité forte mais dont la durée est courte. Celle-ci, pas de risque de passer à côté. Tous les symptômes sont présents.
Elle est parfois aussi chronique. Dans ce cas, l'intensité est moins forte mais elle va durer des mois, voire des années en échappant à la régulation du système immunitaire. Les causes : la persistance d'agents infectieux, une exposition prolongée à des toxiques, des problèmes d'auto-immunité ou d'hyper-porosité intestinale... C'est le cas de maladies inflammatoires chroniques comme les MICI (maladies de Crohn et rectocolite hémorragique), la polyarthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux, le psoriasis, certaines thiroïdites, les plaques d'athérome, le diabète mais également l'obésité... J'insiste sur cette dernière, car contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'obésité est bel et bien une maladie, qui plus est, inflammatoire, dont les causes sont multiples et complexes.
Qu'elle soit chronique ou aiguë, elle est détectée bien évidemment par les quatre symptômes dont on parlait plus haut : douleur, chaleur, rougeur et tuméfaction. Sur les bilans sanguins, un dosage de la protéine C réactive (CRP) permet de la qualifier. Plus la valeur est élevée, plus l'inflammation est intense. Elle constitue un excellent marqueur de l'inflammation et de sa résorption, sont taux augmentant très vite en cas d'inflammation et à l'inverse, diminuant rapidement lorsque la crise inflammatoire se résout.
La valeur normale de la CRP, pour laquelle, on considère qu'il n'y a pas d'état inflammatoire se situe en dessous de 6mg/litre de sang.
Cependant, des études (clic et clic) montrent que même des taux inférieurs aux normes augment le risque de maladies cardio-vasculaires.
Et c'est là que se situe l'inflammation de bas grade. Les CRP sont dans les normes, on ne constate pas de douleur, pas de gonflement ou d'œdème ni rougeur ni chaleur. Cependant, en effectuant un dosage des CRP ultrasensibles lors d'un examen sanguin, on peut voir qu'elles ne sont pas nulles. En vérité, elles ne sont quasiment jamais nulles, le système immunitaire entretenant un fond inflammatoire pour se défendre contre les agressions du quotidien. Mais lorsqu'elles se rapprochent de la limite des 6mg/L de sang, on peut en déduire que l'inflammation de bas grade est présente, même si aucune infection ne peut être détectée. L'inflammation est sous le seuil de perception mais pourtant bien installée.
Mais alors, on s'en fiche non ? On n'a pas mal, pas de symptôme, le docteur est content de nos examens sanguins, on pourrait pas être peinard un peu ?!!
Heu, quand vous allez voir la liste de pathologies en lien avec l'inflammation de bas grade, ça va vous donner envie de vous en occuper de la petite terreur au fond de la classe, calée près du radiateur et qui n'ouvre pas la bouche !
Parce qu'en réalité, ce petit fond inflammatoire très discret fait le lit de nombreuses pathologies chroniques.
On va commencer par tout ce qui touche au métabolisme : résistance à l'insuline, diabète de type 2, syndrome métabolique, obésité et surpoids ...
La sphère cardio-vasculaire n'est pas épargnée puisqu'on constate une augmentation significative des risques d'accidents cardiovasculaires et d'athérosclérose.
Au tour du système digestif : MICI et hyperperméabilité intestinale ...
Mais encore arthrite, arthrose, maladies neuro-dégénératives (Alzheimer, Parkinson ...) et ostéoporose.
On découvre aussi petit à petit des liens avec le cancer, le déclin cognitif, la dépression, la fatigue généralisée, le SOPK (Syndrome des Ovaires PolyKystiques)
Bref, ça fait beaucoup de raisons (et la liste n'est pas exhaustive) de ne pas l'inviter ou en tout cas de s'en débarrasser avant qu'elle ne fasse vraiment des dégâts.
Parce qu'avec cette inflammation de bas grade, le système immunitaire est trop occupé à essayer de lutter contre de potentiels agresseurs, qu'il a bien du mal à trouver. Il n'arrive plus à faire son travail de protection interne : détruire des cellules endommagées qui pourraient devenir cancéreuses, réparer et construire les tissus et les organes.
Mais vous allez voir, il est assez simple de la calmer et on peut vraiment faire des miracles avec l'alimentation. Je suis toujours fascinée de voir toutes les solutions que la nature a mis à notre disposition, juste sous notre nez. Je ne sais même pas si on doit appeler cela des solutions, c'est plutôt ce qui devrait être considéré comme la norme.
Mais avant d'explorer ces "solutions", pourquoi l'inflammation de bas grade vient-elle frapper à notre porte ?
Pour tout vous dire, un bon nombre de ses causes sont quasiment les mêmes que ses conséquences. C'est, en effet, un cercle vicieux.

L'obésité et le surpoids
Notamment lorsque le tissu adipeux viscéral est développé. Ce dernier est considéré comme un organe à part entière. Il ne se remplit pas simplement de graisse. C'est aussi un tissu sécréteur d'hormones et de messagers : les adipokines. C'est un ensemble de molécules exerçant une action pro ou anti inflammatoire avec, en plus des fonctions immunes et métaboliques. Certaines d'entre elles (l'Interleukine 6, le TNFα et la leptine par exemple) ont des propriétés pro-inflammatoires surtout lorsque elles sont sécrétées dans des quantités importantes. L'adiponectine quant à elle, est un messager anti inflammatoire qui augmente la sensibilité à l'insuline, c'est à dire que les glucides que nous mangeons seront mieux utilisés par nos cellules et que ces dernières auront moins besoin de cette insuline et donc de solliciter le pancréas. En revanche, lorsque les autres sont sécrétées plus qu'il ne le faudrait, l'adiponectine, elle, ne l'est plus.
Son absence et la prévalence des autres entraînent des déséquilibres tels qu'une baisse de la sensibilité à l'insuline (logique) qui va générer une insulino-résistance : nos cellules ne sont plus en mesure de faire rentrer le glucose pour l'utiliser comme carburant. On constate également une augmentation des risques d'hyperlipidémies, de prise de poids voire d'obésité, d'hypertension artérielle ainsi qu'une aggravation du terrain inflammatoire qui va à son tour stimuler le développement des graisses viscérales. La localisation de ce tissu adipeux, sur la ceinture abdominale, outre son effet pro-inflammatoire, nuit gravement à la santé cardio-vasculaire. C'est un facteur de risque non négligeable.
Pour résumer, une forte production d'insuline due principalement à la consommation de glucides à index glycémique élevé entraine un développement du tissu adipeux viscéral qui sécrète des molécules qui, en provoquant de l'inflammation favorisent elles aussi la formation de graisse viscérale ce qui augmente significativement les risques de résistance à l'insuline, diabète de type 2, hypertension artérielle, accidents cardio-vasculaires, surpoids, obésité ... Ces pathologies favorisent une forte production d'insuline : l'inflammation est donc auto-entretenue.

L'hyper-perméabilité intestinale :
La barrière intestinale est réellement un chef-d'œuvre de technicité. En situation normale, les cellules intestinales sont reliées par ce que l'on appelle des "jonctions serrées" qui ne laissent passer que quelques molécules d'eau et des ions comme le sodium. Tout ce que l'on ingère, va être découpé en tout petits morceaux qui vont passer à l'intérieur des entérocytes (les cellules de la muqueuse intestinale) pour ressortir sous une forme transportable dans le sang et utilisable par les autres cellules. Rien n'est censé passer au travers des jonctions serrées.
En cas de perméabilité intestinale, ces jonctions serrées se relâchent et des particules alimentaires mal digérées (particulièrement des protéines comme le gluten), des bactéries, des toxines peuvent passer la barrière intestinale et pénétrer dans les vaisseaux sanguins alors qu'elles n'ont rien à y faire. A la vue de ces intrus, le système immunitaire tire la sonnette d'alarme. Il faut se défendre contre ces agresseurs. Cela entraîne des troubles auto-immuns, des allergies, des surcharges hépatiques, une irritation supplémentaire de la muqueuse intestinale qui, par voie de conséquence, peine à absorber correctement les nutriments essentiels, et bien évidemment une inflammation avec une circulation accrue des messagers de l'inflammation dans le système sanguin (rappelez vous, ils sont là pour assurer la défense de l'organisme contre une agression). Ces molécules ayant passé la frontière de manière "illégale" peuvent même perturber le bon fonctionnement de la barrière hémato-encéphalique, celle qui protège notre cerveau.
D'ailleurs, pour n'en citer qu'un, il existe un lien évident entre notre intestin et notre cerveau. On parle parfois de dépression intestinale. Nous produisons la majeure partie de la sérotonine (l'hormone du bien-être et plus encore) dans nos intestins. Dans des cas de dysbiose, le tryptophane, qui est le précurseur de la sérotonine est dégradé par nos bactéries intestinales et des déficiences en nutriments comme le magnésium et certains acides aminés ainsi que l'inflammation inhibent la production de sérotonine. On voit donc que ce qui se déroule dans l'intestin a un impact sur notre cerveau et dans ce cas là, notre humeur.
Ce qu'il faut retenir : l'intestin est le siège de notre immunité et c'est par cette voie que nous faisons entrer dans l'organisme nos aliments, des corps étrangers susceptibles de contenir des agresseurs. Un intestin en bonne santé est donc la garantie d'un organisme en bonne santé.

Le stress oxydant :
Je vous en parlais dans mon article sur les polyphénols (clic), il est également une cause d'inflammation.

Le stress chronique :
En situation de stress prolongée, notre organisme et plus particulièrement nos glandes surrénales sécrètent une hormone : le cortisol. Il va calmer la réaction du système immunitaire qui réagit au stress comme à une agression. Cependant, lorsque notre stress est dû à des facteurs externes comme le travail ou les soucis quotidiens, le système immunitaire se heurte à un mur, il ne peut pas agir sur ces causes. Il va donc s'emballer et de plus en plus de cortisol va être produit, jusqu'à l'épuisement. Après quelques temps, si l'inflammation n'est pas résolue, la production de cortisol va baisser, en levant le frein exercé sur le système immunitaire. Ce dernier n'ayant pas de véritable agresseur à combattre va se retourner contre les tissus et cellules de l'organisme générant une inflammation supplémentaire à celle déjà provoquée par le stress en lui même.

Le manque de sommeil :
Le sommeil a un rôle réparateur, régénérateur et anti-inflammatoire. Une seule mauvaise nuit peut perturber notre glycémie et notre métabolisme sur plusieurs jours. Un manque de sommeil quotidien a donc des effets délétères sur notre santé générale et particulièrement sur l'inflammation. Des études (clic, clic) ont prouvé qu'un mauvais sommeil augmentait de 50% le risque de maladies cardio-vasculaires et constituait un facteur de risque de diabète, hypertension, et affections inflammatoires comme la polyarthrite rhumatoïde.
Prendre soin de ses nuits et ce, sur le long terme a un impact beaucoup plus important que ce qu'on pourrait imaginer. C'est véritablement l'un des piliers d'un corps en bonne santé, quel que soit notre âge.

L'exposition prolongée à des toxiques :
On ne le répètera jamais assez, il y a effectivement des avantages notables en terme de santé à consommer des aliments d'origine biologique. En effet, les pesticides, perturbateurs endocriniens, fongicides, métaux lourds, engrais ... ont tous des effets potentiellement inflammatoires (et bien d'autres que je ne détaillerai pas ici). L'eau que nous buvons, qu'elle soit du robinet ou distribuée dans des bouteilles en plastique influe également sur notre santé.
Une alimentation composée essentiellement de produits ultra-transformés par des procédés industriels ajoutant des additifs et conservateurs de toutes sortes s'éloigne tellement de la nourriture brute que nous sommes censés consommer. On peut rajouter à cela que la variété a disparu de nos assiettes. Nos ancêtres consommaient plus de 500 sortes de racines et de plantes, nous sommes aujourd'hui bien loin de nous nourrir comme notre organisme en aurait besoin.
La multiplication des sources de contamination, que ce soit dans l'alimentation, l'air que nous respirons, l'eau que nous buvons, les produits d'hygiène, de beauté et d'entretien entraine une recrudescence des agressions quotidiennes contre l'organisme qui doit se défendre en permanence. Le système immunitaire est sur le pied de guerre de manière chronique et se défend en provoquant ... de l'inflammation !!!

Des foyers infectieux peu symptomatiques :
Ils peuvent être buccaux, comme la parodontite ou des caries qui ne sont pas douloureuses, une infection des voies ORL, les sinus par exemple, une petite infection urinaire ou gynécologique qui passerait inaperçue... Ils provoquent une réaction inflammatoire chronique mais très modérée qui contribue à mettre en alerte le système immunitaire en continu.

Des allergies ou intolérances ignorées :
Elles aussi forcent le système immunitaire à réagir et à créer de l'inflammation pour pouvoir se défendre, ce qui fait fatalement augmenter le nombre de messagers de l'inflammation circulants.
Les éléments provoquant ces réactions peuvent provenir de l'alimentation (pour n'en citer que quelques uns : oeufs (présence d'histamines dans le blanc), ail, oignons, fruits à coque, gluten, lactose et caséine, lectines, avocat, fruits rouges, glutamate, sulfites mais aussi des produits de soin qu'on utilise, de médicaments, des lessives et adoucissants pour nos vêtements...

La sédentarité :
C'est le mal de nos civilisations modernes. Moi-même, devant mon ordinateur, en train d'écrire cet article, je me dis que ce n'est certainement pas pour ce genre d'activité que nous avons été conçus. Mais les impératifs de notre vie ne nous laissant parfois que peu de marge de manœuvre, nous pouvons nous adapter en réservant quelques créneaux pour une activité sportive.
Rien que 30 minutes de marche quotidienne influent sur notre métabolisme, notre équilibre staturo-pondéral, notre masse maigre (les muscles), notre santé mentale et sur cette fameuse inflammation. Ces trente minutes quotidiennes augmentent même notre espérance de vie de plusieurs années.
Vous êtes maintenant incollables sur l'inflammation de bas grade, mais vous vous demandez certainement, "et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?"
Ce sera l'objet de mon prochain article, quelles solutions adopter afin de limiter au maximum l'inflammation ?
À très vite pour la suite .
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